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Présentation :
Les pages qui traitent de la Révolution française dans L’Homme révolté n’ont guère suscité de polémiques. Elles allaient pourtant à l’encontre de la doxa de la gauche, illustrée en Sorbonne par Georges Lefèvre, qui faisait de 93 une étape logique et indispensable vers l’égalité. Camus ne rejoint cependant pas les penseurs libéraux ou modérés qui opposent à la promesse de 89 l’épisode sanguinaire de la Terreur. À ses yeux, la sacralisation de la Raison a frayé la voie à ceux qui, appliquant avec intransigeance les principes du Contrat social, élimineront quiconque ne se conforme pas à la Volonté du peuple. N’ayant ni une vocation, ni une culture d’historien, Camus a écrit L’Homme révolté comme un pamphlet (une « protestation ») contre les totalitarismes de son siècle, y cherchant les racines jusqu’aux principes de notre révolution. Auteur tragique, il élit en Saint-Just un protagoniste, figure noire et grandiose (« archange de la Terreur »), qui éclipse les autres acteurs (Chamfort, révolté heurté par la révolution, est une autre figure tragique de la période). Les philosophes du XVIIIe siècle, qualifiés par lui d’« intellectuels », sont au début de la chaîne : « Marx achève le mouvement de négation commencé par la philosophie des Lumières ». Camus, ennemi du progrès ? Oui si, comme il l’écrivait dès 1937, on appelle ainsi l’idée bourgeoise qui a infesté les mouvements ouvriers. Oui encore si, à la manière de Condorcet, on le conçoit comme une trajectoire rectiligne et infinie. Au nom du progrès, on a substitué à un monarque de droit divin une Raison abstraite ignorante des exigences de la mesure.
Pierre-Louis Rey
Conférencier :
Pierre-Louis Rey est professeur émérite à la Sorbonne nouvelle. Membre de la SEC et du comité de rédaction de Présence d’Albert Camus, il a collaboré à la nouvelle édition de Camus dans la Pléiade et édité son théâtre dans la collection « Folio-Théâtre ».