Présence d’Albert Camus n°4 – 2013

Le numéro 4 de notre Revue Présence d’Albert Camus vient de paraître. En voici le sommaire et les résumés des contributions en français et anglais. Vous pouvez commander ce numéro (et les précédents également) au prix de 12€ le numéro (+ 3 € de frais de port pour la France) à l’adresse de l’association : 18 avenue René Coty, 75014, Paris.

SOMMAIRE :

Entretien d’Albert CAMUS avec Gaëtan PICON

CONTRIBUTIONS :
Arnaud CORBIC, « L’Étranger de Luchino Visconti (1967
Philippe SVANDRA, « Sauver les corps, pour que l’avenir demeure possible »
Alexis LAGER et Franck PLANEILLE, « Une œuvre à « deux visages » : Échos, intertextes et réécritures dans La Postérité du Soleil »
Vincent GRÉGOIRE, « Le football : clé symbolique de l’œuvre de Camus »
Guy BEDOUELLE, « Les esquisses d’un artiste »
Beate MÜNSCHKE, « La réception d’Albert Camus par les écrivains dans la Pologne d’après-guerre »

DOCUMENTS :
Au fil des années et des parutions (Henri Hell)

ÉTUDES UNIVERSITAIRES :
Rémi LARUE, « Aux origines des positions d’Albert Camus dans la guerre d’Algérie ? Entre journalisme et philosophie ? »

COMPTES-RENDUS d’ouvrages par André ABBOU, Marie-Louise AUDIN, Guy BASSET, Jean-Louis BENEZECH, Anne-Marie TOURNEBIZE, Philippe VANNEY, David H. WALKER

BIBLIOGRAPHIE
VIE de la Société des Études Camusiennes
DISPARITIONS : Marguerite DOBRENN, François CHAVANES
ABSTRACTS des contributions

RÉSUMÉS/ABSTRACTS du numéro :
Arnaud CORBIC,« L’Étranger de Luchino Visconti (1967) »
Alors qu’Albert Camus a toujours refusé, de son vivant, l’adaptation cinématographique de L’Étranger, après sa mort, Francine Camus, la veuve de l’écrivain, elle-même réticente, consent finalement, sur le conseil de ses amis, à céder les droits cinématographiques du roman au producteur italien Dino De Laurentiis qui les acquiert. Mais il est stipulé dans le contrat qu’elle choisit elle-même le co-scénariste (qui sera le camusien Emmanuel Roblès, garant de la fidélité au roman), ainsi que le réalisateur. Le choix de Francine Camus s’arrête finalement sur Luchino Visconti. Elle exigea de celui-ci la fidélité la plus littérale au roman et s’opposa au premier scénario du cinéaste italien – co-écrit avec Georges Conchon et Suso Cecchi D’Amico – qui relisait l’histoire de Meursault à la lumière des événements ultérieurs survenus en Algérie, en l’inscrivant notamment dans le contexte de la guerre d’Algérie. Toutefois, grâce au regard de Visconti, L’Étranger (Lo straniero) entretient d’intimes connivences avec le roman d’Albert Camus

Arnaud CORBIC, « Luchino Visconti’s movie L’Étranger [The Stranger] (1967)”
Although Albert Camus always refused any film adaptation of The Stranger during his lifetime, after his death, his wife Francine, herself reluctant at first, finally agreed, on the advice of her friends, to sell the film rights of the novel to the Italian movie producer Dino de Laurentiis. But it was stipulated in the contract that she would choose the co-writer herself (it would be the Camusian Emmanuel Roblès, responsible for the faithful adaptation of the novel), as well as the director, Italian filmmaker Luchino Visconti. Francine Camus demanded a strict fidelity to the novel and refused the first scenario put forward by Visconti – a scenario co-written by Georges Conchon and Suso Cecchi D’Amico – which rewrote the story of Meursault in the light of subsequent events, notably by placing it within the context of the Algerian War. However, thanks to Visconti’s perception, The Stranger (Lo straniero) maintained close connections to Camus’s novel.

Philippe SVANDRA, « Sauver les corps, pour que l’avenir demeure possible »
Si Albert Camus n’a jamais réellement traité de la question du soin directement, cet article cherche à montrer combien sa pensée est à la source de l’engagement soignant. Ce sentiment d’impuissance face à l’absurdité de ce monde « déraisonnable » que Camus ne cesse d’évoquer dans ses ouvrages parle en effet naturellement aux soignants qui sont en contact quotidiennement avec la maladie, la vulnérabilité, la souffrance et la mort.
Face aux différentes figures du mal, la seule réponse moralement possible pour Camus, c’est la révolte. Ainsi, face à la peste qui fauche sans distinction les habitants d’Oran, les actions qu’organisent le docteur Rieux et ses compagnons relèvent d’une forme de révolte contre l’inacceptable. En se battant pied à pied avec peu de moyens, Rieux n’a au fond qu’un seul but : sauver les corps, pour que l’avenir demeure possible.
Forme d’obligation morale, de convocation à l’action, le soin en reconnaissant l’humanité de l’autre nous permet ainsi de conserver toute la nôtre. Dès lors, comme Sisyphe, il est possible d’imaginer le soignant heureux.

Philippe SVANDRA, « Save the bodies, so that the future is possible »
If Camus never really addressed the issue of caregiving directly, this article seeks to show how his thought is at the source of caregiver engagement. The feeling of powerlessness against the absurdity of this unreasonable world regularly developed by Camus in his works speaks in a very natural way to caregivers who are in daily contact with sickness, vulnerability, suffering and death. In response to the various forms of evil, the only moral answer for Camus is to revolt. Thus, faced with the plague that is mowing indiscriminately the Oran inhabitants, the assistance organized by Doctor Rieux and his companions reflects a type of revolt against the unacceptable. By fighting toe to toe with few resources, Rieux essentially has one goal: saving the body, so the future is possible. As a form of moral obligation as well as a call to action, the care provided to others, while recognizing their humanity, allows caregivers to conserve theirs. As a result, it is possible to imagine the caregiver happy, the way Camus’s Sisyphus is.

Alexis LAGER et Franck PLANEILLE, « Une œuvre à « deux visages » : Échos, intertextes et réécritures dans La Postérité du Soleil »
Cet article tire son origine du dialogue amical, entamé début 2009, entre Franck Planeille et Alexis Lager. Analysant les intertextes et les échos à l’œuvre dans La Postérité du soleil, il s’agit de questionner le rapport que Camus entretient avec l’œuvre de Char et de tenter d’éclaircir la notion d’identité créatrice. Comment cette œuvre singulière, aux accents chariens, évite-t-elle l’écueil du plagiat sans se limiter à un simple exercice d’admiration ? Nous verrons qu’elle se constitue plutôt comme une chambre d’échos où des thèmes fondateurs de l’œuvre camusienne émergent de l’enchantement de la lecture de celle de Char. Camus semble alors se recentrer, se réorienter au coeur de sa propre création dans cette fusion-confrontation de sa voix avec celle du poète.

Alexis LAGER et Franck PLANEILLE, « A two-face work : echoes, intertexts and rewritings in La Postérité du soleil [Posterity of the Sun] »
This article was born at the beginning of 2009 out of a friendly dialog between Frank Planeille and Alexis Lager. While analyzing the intertexts and echoes at work in Posterity of the Sun, this study focuses on the particular interest Camus had for Char’s works, and it tries to shed light on the notion of creative identity. How did this singular work characterized by Charian accents avoid the pitfall of plagiarism without limiting itself to a simple exercise in admiration/praise? We will see that this work is shaped like an echo chamber where the founding themes of Camus’s works emerge from the enchantment of reading Char’s. Camus seems then to recenter himself at the heart of his own creation within the confrontation-fusion of his voice with the poet’s.

Vincent GREGOIRE, « Le football : clé symbolique de l’œuvre de Camus »
Camus a toujours été passionné par le football. A l’école, c’était un joueur intrépide qui se donnait à fond à ce sport malgré l’interdiction de sa grand-mère de ne pas y jouer pour ne pas abîmer ses chaussures. Sa courte « carrière » de gardien de but pour le RUA (Racing Universitaire Algérois) va être interrompue à 17 ans par des attaques de tuberculose qui vont progressivement détériorer sa santé. Le rêve du jeune Camus de faire carrière dans ce sport est fini ; mais l’adolescent n’oubliera jamais les valeurs qu’il y a apprises : camaraderie, loyauté, honneur, fairplay, abnégation, courage physique, mais aussi l’importance de posséder un solide esprit de lutte, une très grande volonté de gagner et une attitude digne dans la défaite. Dans cette étude, nous allons développer le rôle et l’influence du football dans la vie de Camus et dans ses œuvres de fiction

Vincent GREGOIRE, “Soccer : a Symbolic Key to Understand Camus’s Works of Fiction”
Camus always loved soccer. At school he was a fearless player. But his short “career” as a goal keeper for the RUA (Racing Universitaire Algérois) comes to an end at age 17 with the first attacks of tuberculosis which will plague his entire life. His dream of playing soccer competitively is over. Nevertheless, he will never forget the values he acquired: camaraderie, loyalty, honor, fair play, abnegation, physical courage, but also a fighting spirit, a tremendous will to win, and a dignified attitude in defeat. In this study, we will develop the role and influence of soccer, first in Camus’s life, and then in his works of fiction.

Guy BEDOUELLE, « Les esquisses d’un artiste »
Dans sa leçon inaugurale du premier colloque sur les Carnets de Camus, Guy Bédouelle a centré son propos sur la notion de beauté comme thème principal de l’oeuvre de l’écrivain. Il explique que le mot “beauté” est au centre de la réflexion sur le concept “d’artiste”. Guy Bedouelle est décédé en Mai 2012 et son texte n’est pas paru dans les actes du colloque.

Guy BEDOUELLE, « Sketches of an artist »
Guy Bédouelle, in the opening presentation to the first Colloquium on Camus’s Carnets [Notebooks] held in Angers in November 2010, focuses on beauty as the main theme of the writer’s opus. He explains that the word “beauty” is at the center of a reflection on the concept of “the artist”. Guy Bédouelle died in May 2012 and his paper was not included in the conference proceedings.

Beate MÜNSCHKE, « La réception d’Albert Camus par les écrivains dans la Pologne d’après-guerre »
Cet article analyse la réception littéraire des oeuvres de Camus par les écrivains polonais de l’après-guerre en réaction avec l’arrière-fonds idéologique du “réalisme social” et du contrôle éditorial exercé par les autorités communistes. Le profond intérêt des écrivains polonais pour les oeuvres de Camus ne peut être expliqué uniquement par les innovations esthétiques de l’écrivain, mais doit prendre en compte les aspects moraux et psychologiques des personnages peints dans ses oeuvres, plus particulièrement celui de Clamence (dans La Chute). Les écrivains polonais – par exemple Kazimierz Brandys or Jaroslaw Iwaszkiewicz – ont décrits des caractères qui montrent une ambivalence semblable. Cette innovation apparue pendant l’ére communiste provient de façon décisive de l’influence des oeuvres de Camus

Beate MÜNSCHKE, « The Reception of Camus’s Works in Post-WWII Poland »
This paper analyzes the literary reception of Albert Camus’s works by Polish writers during the post-war period by putting it against the background of Social Realism and the editorial control imposed by Communist authorities. The deep interest of Polish writers in Camus’s works cannot be explained only by the writer’s aesthetic innovations, but also because of the complex moral and psychological depictions of his protagonists, particularly of Clamence in La Chute [The Fall]. Polish writers – such as Kazimierz Brandys or Jaroslaw Iwaszkiewicz – developed characters with similar ambivalence. This innovation in Polish literature during the Communist era was decisively influenced by Camus’s works.

 

Alexis Lager
alexis.lager@gmail.com